Dans une société futuriste, une panne d'électricité provoque le chaos général : les villes sont désorganisées, les moyens de transport, entre autres technologies, ne sont plus utilisables et les habitants ont perdu tout repère. Afin de protéger sa bien-aimée, François Deschamps décide de fuir Paris et prend la tête d'un groupe de résistants pour tenter de regagner son village natal, Vaux, mais leur périple ne se déroulera pas sans problème.
« Je ne vous demande pas d'oublier nos morts, mais de penser d'abord à vous et à vos camarades vivants. Nous reprendrons le souvenir de ceux tombés en cours de route quand nous aurons atteint le but. »
En bref... malgré ses défauts, ce livre m’a fait voyager dans un Paris futuriste que j’ai aimé découvrir. Si l’écriture de Barjavel m’a parfois posé problème, j’ai adoré pouvoir replacer le livre dans son contexte d’écriture, et donc trouver des références à d’autres œuvres de l’époque.
Mon avis est quelque peu mitigé sur ce livre. L'histoire ne m'a pas tellement plu, mais en revanche, j'ai beaucoup aimé les différentes images évoquées dans ma lecture. En effet, différents passages m'ont fait pensé à d'autres livres, dont je vous reparlerai après. Tout d'abord, j'ai été incitée à lire ce roman dans le cadre d'une séquence sur l'utopie et la contre-utopie en littérature, et il est vrai que l'on retrouve ces deux formes de sociétés dans l'œuvre.
La société présentée dès le début du roman témoigne bien d'un univers dystopique : une nouvelle société issue du progrès technologique a permis de développer de nombreux outils permettant d'épargner aux Hommes le moindre dérangement, et faciliter leur vie ; tout repose sur l'électricité, de l'eau courante aux fermetures des vêtements, en passant par les armes et évidemment les moyens de transport. J'ai beaucoup aimé découvrir Paris sous cet aspect, la société est réellement bien développée et novatrice (je pense aux Conservatoires qui permettent de maintenir les morts en "activité") et les descriptions m'ont vraiment permis de me représenter précisément les reliefs de la ville (bien que certains faits "prédits" par l'auteur ne se soient pas réalisés). Dans le roman divisé en quatre parties, cela représente la première, intitulée "Les temps nouveaux", ce qui, vous pouvez vous en douter, est très bien choisi. La deuxième partie "La chute des villes" traite des conséquences de la dépendance des villes à l'électricité, puisque le principal événement perturbateur est la panne d'électricité qui entraîne un "retour aux sources", auquel sont peu habitués les Parisiens, et les citadins en général. On découvre également la formation du groupe qui va partir à l'aventure avec François, et le début de leur fuite jusqu'à la forêt : je dois avouer que cette partie est extrêmement longue (je dirais la moitié ou presque du roman), et elle a rendu ma lecture quelque peu laborieuse. La troisième partie "Le chemin des cendres" raconte la fin de leur périple, et montre leurs grandes difficultés à survivre. Ce passage est plutôt intéressant, mais je me suis demandée pourquoi Barjavel avait séparé cette partie de la précédente, les deux traitant de leur fuite vers le Sud et ne marquant pas de rupture particulière entre les deux. Enfin, la dernière section du roman "Le patriarche" est celle que j'ai préférée avec la première, car elle montre la création d'une société utopique autour d'un chef, François. Les deux parties que je viens de citer sont donc comparables, dans le sens où un parallèle intéressant est dressé entre les deux modes de vie opposés : les valeurs prônées vont à l'encontre de la mécanisation et vantent les mérites du travail manuel.
A présent que je vous ai présenté les différentes parties du roman, vous comprendrez mieux en quoi elle m'ont fait pensé à d'autres références littéraires ou historiques : prenons tout d'abord la seconde section, qui montre donc un groupe se former pour lutter contre le mal présent partout ; pendant un long moment, cela m'a fait penser au groupe formé autour du docteur Rieux dans La Peste d'Albert CAMUS, publié en 1947, mais la Résistance de Camus est mieux développée, et le groupe contient des personnalités plus différentes, et plus intéressantes. L'aventure collective qui se poursuit durant la suite du livre a fait perduré cette référence, mais introduit également le même voyage initiatique que celui de Candide dans le roman d'apprentissage éponyme de Voltaire au XVIIIème siècle, avec les nombreuses péripéties et la succession d'obstacles... Comme dans Candide, certaines actions étaient plutôt précipitées, et auraient mérité d'être plus développées, ou à défaut plus espacées : j'ai eu l'impression qu'il n'y avait que de l'action et des malheurs, regroupés sur environ 180 pages ! L'arrivée dans le village paisible et la fondation d'un nouveau mode de vie a évoqué Gargantua de Rabelais, écrit au XVIème siècle, et l'utopie de l'Abbaye de Thélème à la fin du roman : de la même façon que le géant rabelaisien, François crée une société nouvelle où l'harmonie règne pour le bien de tous. Les valeurs qui y sont défendues ne sont pas sans rappeler celles du régime de Vichy durant la Seconde Guerre Mondiale avec la devise "Famille, Travail, Patrie" : cela s'applique très bien à Vaux, puisque le but de François est de repeupler la France et même le monde, en prenant plusieurs épouses et en donnant des centaines d'enfants ; chaque famille doit cultiver la terre, et mener des activités manuelles. Le partage collectif des richesses m'a également fait penser au communisme et à la collectivisation en URSS, d'ailleurs évoquées dans La Ferme des animaux de George ORWELL en 1945... Vous l'aurez compris, ce livre est riche en connotations, mais peut-être était-ce fait exprès par Barjavel ? En effet, en observant la date de publication de Ravage, on se rend compte que 1943 voit cette contre-utopie paraître en pleine Seconde Guerre Mondiale. Il est donc légitime de retrouver des allusions au contexte historique de l'époque : le dossier d'Yves ANSEL qui suit le roman (275 pages) dans mon édition (355 pages) développe d'ailleurs certains rapprochements avec le régime de Vichy et Pétain... Cependant, La Ferme des animaux et La Peste sont postérieurs à Ravage, dans ce cas, sont-ce Orwell et Camus qui se seraient inspirés de Barjavel ?
Dans cet univers apocalyptique est toutefois développée une intrigue secondaire présente uniquement dans la première partie du livre : le triangle amoureux. En effet, François, tout d'abord dans son village natal, a hâte de revoir à Paris sa fiancée -même si ce n'est pas officielle- également courtisée par le directeur d'une importante chaîne de radio à Paris, Jérôme Seita. Alors que ce genre de configuration a tendance à m'agacer, le triangle est tellement éphémère dans ce roman que j'en suis venu à le regretter, car, par la suite, on ne retrouve pas de réelle intrigue amoureuse, et Blanche -la jeune femme disputée- prend une place secondaire dans l'intrigue. François Deschamps est le premier personnage que l'on rencontre. Je n'ai pas vraiment apprécié son caractère, trop autoritaire à mon goût, alors qu'il est censé incarner l'homme parfait, ou du moins exemplaire. Jérôme Seita au contraire m'a été beaucoup plus amical, même si son rôle dans le roman ne le met pas forcément en valeur. Blanche Rouget est quelque peu naïve, mais pas très présente dans la plus grande partie du livre. Enfin, les autres membres de l'expédition sont banals et presque stéréotypés.
Quant à l'écriture de Barjavel, je regrette les longueurs de la deuxième partie, et la précipitation des rebondissements -oui c'est paradoxal !-. C'est donc un livre que j'ai plutôt apprécié pour les deux univers créés au début et à la fin du roman, mais je ne me suis pas particulièrement attachée à l'histoire en elle-même, ni aux personnages, ce qui a rendu ma lecture très laborieuse.
J'ai lu ce livre au lycée, et je l'ai trouvé très bien écrit avec une histoire très originale. Tu en fais d'ailleurs une très bonne critique ! Livre à lire absolument !
RépondreSupprimerL'histoire ne me tente pas vraiment. D'habitude, ce n'est pas du tout le genre d'intrigue et de style d'auteur que j'aime. Mais, tu en as fait une critique très intéressante. Si j'ai l'occasion de le lire, pourquoi pas, ça changerait de mes lectures habituelles.
RépondreSupprimerJe pense que toute personne lisant de la dystopie doit l'avoir lu une fois dans sa vie. Il y a des éléments vraiment intéressants. Même si mon avis est mitigé, la valeur de ce livre est non négligeable !
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